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Hey ! Ça vous dit qu’on vous fasse la journée selon nos points de vue respectifs ? Oui ? Cool ! Non ? Pas le choix ! Après tout, c’est nous qu’on décide sur ce blog… Allez, ne ronchonnez pas c’est deux pour le prix d’un… Y’aura « dans la peau de Damien, sportif émérite » et également « dans la peau de Marine & N’Lou, coachs pragmatiques » !
Je vais essayer de faire un récit aussi palpitant que la journée de « cinglé » que j ‘ai vécu ! J’avais ouï dire par un ami triathlète (hello Xavier) qu’il y avait une sorte de défi assez fou autour du Mont Ventoux. Déjà que c’est le Paradis du cyclisme… Mais là c’est encore différent.
Il s’agit pour les plus téméraires, de grimper le Mont Ventoux par ses trois versants au départ respectif des villes de Bédoin, Malaucène et Sault sur une tranche horaire de 24h max. Ce qui représente environ 135 kilomètres pour 4000 mètres de dénivelé positif !
On peut même se faire remettre un diplôme par l’association gérant ce défi nommé « Les cinglés du Ventoux » mais là faut s’y prendre des semaines à l’avance pour faire homologuer le défi ! Ce n’était pas l’idée…
Bon je vous avoue qu’en me dirigeant vers le plus haut sommet de Provence, l’idée me trottait dans la tête ! Il me suffirait juste de le vendre à Marine comme une expérience de dingue et c’était partie pour l’aventure ! Pour le coup, j’ai une « Madame » qui a vite ôté les quelques hésitations que j’avais encore… Elle m’a poussé littéralement dedans : « Tant que tu n’auras pas fait les 3 côtés, pas la peine de rentrer ! ». Bon bah, il n’y a plus qu’à alors !
Me voilà donc debout à 06h00 pour une mise en selle prévue à 07h00. Je vise la réalisation du défi en 08h environ pour avoir l’après-midi libre afin de récupérer. Au réveil, ça sent la fumée dans le village… Mon Dieu serait-ce le Ventoux qui prend feu ? Ah non, pas aujourd’hui… A priori, il s’agissait « seulement » d’un petit départ de feu dans le village…
Je m’enfile deux cafés et part à jeun comme j’ai l’habitude de faire pour ensuite déjeuner en selle lorsque le ventre se réveille. Un petit bisou à mes 2 amours dans leur tente (bien entendu, ma place laissée chaude a été vite récupérée par N’Lou…). Un mot d’encouragement par ma douce est c’est parti !
La journée va être magnifique d’un point de vue météo ! Et sans doute chaude en début d’aprèm ! Il va falloir être efficace ce matin…Je connais les deux premières parties du parcours, les montées par Bedoin et Malaucène car je les ai réalisées deux ans auparavant sur deux journées distinctes. J’ai d’ailleurs encore quelques images en-tête des montées.
Je pars donc à 06h50, pour le moment plutôt serein, mais sans toutefois savoir si et comment je vais finir. C’est un tout autre exercice que celui réalisé dans les Pyrénées (le Col du Tourmalet). A l’heure où je donne mes premiers coups de pédale, il y a peu de cyclistes sur la route, ça devrait cependant se densifier dans la journée !
Les premiers 5 kilomètres sont durs pour moi car le corps se réveille tranquillement et les premiers pourcentages ne sont pas faciles à avaler. Mais au fur et à mesure, je me sens de mieux en mieux. C’est les coups de 08h00 que je reçois un sms : Marine et Loulou sont déjà en route pour venir me supporter ! Voilà qu’elle va découvrir ce sommet dont elle a déjà beaucoup entendu parler : le fameux Ventoux !
Le mot de Marine : On était bien au lit dans notre tipi avec N’Lou, mais ç’aurait été dommage de louper Damien en haut de son premier sommet de la journée. Des encouragements ça fait toujours plaisir alors, ni une ni deux, on s’est pris un bol de Nesquik et quelques croquettes sur le pouce et hop on a mis le GPS pour nous mener au sommet…
Oh oh. On devrait arriver tout pile, voire même louper Damien d’après les infos trafic et le temps estimé annoncé par mon homme. Avec prudence, j’enchaîne les virages et je découvre les lacets qui nous emmèneront en haut du col. Ce n’est pas du gâteau. Je vois les gens apprécier, voire subir la côte. Des jeunes, des plus vieux, des groupes, des solos, des femmes ! En toute honnêteté, je m’imagine à leur place et je me dis qu’elles sont bien courageuses et que je n’aurais pas leur force…
Allez, trêve de divagations, il nous faut retrouver notre Damien qui s’est élancé parmi ces dingos !
Je passe le fameux Chalet Reynard, qui marque le début de la « fin du col », c’est-à-dire que la forêt laisse place au paysage lunaire qu’on connaît du « Mont Chauve » comme on le surnomme par ici. Et c’est aussi à partir de cet endroit que les premiers forts pourcentages se dessinent (10-12%).
Après avoir fait le plein de mes bidons, je reprends mon ascension. C’est d’ailleurs dans ces premiers virages que Marine me rejoint à grands coups de klaxon. Sa façon de me donner des encouragements à distance, tandis que N’Lou pigne par la fenêtre à qui voudra bien l’entendre que son maître est sur un vélo loin de lui ! Je les recroiserai plusieurs fois sur ces 6 derniers kilomètres lors de leurs stops photos / encouragements !
Fini pour le sommet par Bédoin : 22,7 km (1622m de D+ et 7,15% de moyenne, 10,8% max) ! Je suis en haut pour le premier checkpoint de la journée ! Je prends juste le temps de manger 2 barres de céréales Cliff, fait une photo, des bisous et c’est reparti pour ma première descente en direction de la ville de Malaucène. La descente est agréable et se fait sans grand vent, pourtant caractéristique de ce sommet.
Le mot de Marine : eh bien nous avec N’Lou, après avoir félicité Damien et fait plein de bisous, on s’est dit que le spot était terrible et que ce serait bête de ne pas sortir le drone. Alors on est allés voir depuis plus haut comment les oiseaux percevait ce fameux Mont Chauve.
Celui qui n’est rattaché à aucune montagne et qui culmine à 1909 mètres d’altitude. On le grimpe en voiture, à pied, à vélo pour avoir une vue sublime sur les environs. Mais surtout on y passe des cols pour le redescendre du même côté ou vers un autre des 3 villages situés à son pied.
Je repère au passages les difficultés de la montée qui m’attend, ce qui est l’avantage de réaliser la descente avant l’ascension. Malaucène, la seconde montée la plus gravie, est redoutable avec ses 11, 12 et 13e kilomètres à 11% de moyenne. Il va falloir en garder sous la pédale même pendant les passages les plus plats.
Je fais donc demi-tour dans le petit village et je repars pour ma deuxième ascension de la journée. Pendant ce temps, Marine est toujours sur la route du retour… Le sommet du Ventoux étant bloqué, elle n’a pas pu me suivre pour descendre avec moi, elle a dû prendre la direction de Bedoin et rejoindre par le bas, la ville de Malaucène. Je n’aurais donc pas de bisou d’en bas de la côte !
Les jambes répondent présentes et je peux mettre un rythme convenable pour maintenir une allure qui me permettra d’arriver avant 12h là-haut. Il y a déjà beaucoup plus de cyclistes sur les routes ce qui me donne énormément de mini objectifs à atteindre pour dynamiser la montée (les dépassements). Ce qui est rassurant, c’est que je n’ai été doublé qu’une seule fois pour le moment.
J’arrive très rapidement au fameux passage qui comme je vous le promettais allait être compliqué. Je vis alors mes premières grandes souffrances de la journée.Malgré aucune sensation de faim, une envie de sucre se ressent et je n’ai presque plus d’eau… Ces trois kilomètres ont été ceux qui m’ont fait regretter de m’être levé ce matin…
Ils passent très lentement, mais me permettent d’atteindre un petit restaurant à qui je peux acheter une canette de coca… Une aubaine que j’ai prévu un peu de liquide car ils ne remplissent les gourdes que pour les clients ! Ce coca me fait un bien fou, comme toujours pendant l’effort, et j’ai la force qu’il faut pour achever les 6 derniers kilomètres pour en terminer avec cette seconde montée. Ça passe encore cette fois-ci mais avec une petite fatigue qui fait son apparition.
Fini pour le sommet par Malaucène : 21,2 km (1535 de D+ et 7,24% de moyenne, 11% max) ! L’arrivée en haut est tout autre que la première : un nombre incalculable de cyclistes sont en mode selfie devant la pancarte du sommet. Je passe vite mon chemin… Marine n’est pas là pour me pousser à prendre une photo !
C’est pourtant à cet instant qu’un type tout droit venu d’Anvers, parvient au sommet… Il est repérable car il réalise un voyage à vélo en « Grand Bi » ! Vous savez ces vélos avec une gigantesque roue devant et petite roue à l’arrière. Ce « fou » avait posté un message sur Facebook le matin-même dans un groupe de voyageurs à vélo pour raconter son délire !
Et je le croise donc au sommet de ce monstre. Je passe le féliciter et filer vers Sault là où m’attendra Marine. Je me ravitaillerai là-bas avant d’en finir avec ce défi fou. Je vous avouerai que je ne suis pas serein pour la dernière étape qui m’attend et je la redoute très clairement.
Le mot de Marine : Pendant ce temps-là avec Loulou, nous avons eu le temps de rejoindre le village de Malaucène où je pensais pouvoir acheter à Damien la fameuse carte officielle des cinglés du Ventoux. Mais depuis peu, on ne peut l’acheter qu’en ligne pour que le business ne passe plus que par leur asso. Tant pis…
On a donc continué notre chemin et le GPS nous annonçait alors une petite heure de route afin de rejoindre le prochain village : Sault. N’Lou me rejoue son rôle préféré de Joe la Déprime en copilote… Nous sommes pour cela passé par le Nord du Mont Ventoux, ce qui nous aura permis d’en faire le tour complet finalement sur la journée. On oscille ainsi entre la Drôme et le Vaucluse dont les frontières de département se dessinent bizarrement on dirait.
Finalement, on découvre en chemin le joli village de Montbrun-les-Bains (dans la Drôme) ainsi que les champs de lavande qui constituent le plateau de Sault. Cela me donnera l’occasion d’échanger rapidement avec le propriétaire de l’un des champs près du village d’Aurel qui découpait sa lavande à la faucille. Ils en vendent des bouquets, des sachets type pot-pourri, en font des savons… Et ont une superbe boutique pas loin m’annonce-t-il !
On ne traîne cependant pas, ce serait bête de louper Damien même s’il a quand même 26 kilomètres de descente avant de nous rejoindre. L’occasion pour nous de découvrir le village de Sault assailli de cyclistes en tous genres et surtout de toutes nationalités… et de faire un tour sur le marché artisanal pour se dégourdir les pattes !
Il est 12h15 quand je suis en bas. Marine m’attend pour me ravitailler en coca (cette seconde canette passe toute seule), en eau fraîche et en barres de céréales. Toujours en mode léger afin de ne pas digérer sur la selle et éviter les maux de ventre.
La montée depuis Sault est plus longue : 26 kilomètres mais moins pentus avec une vingtaine de bornes à 4,6 % de moyenne. Pour tuer le temps plus facilement, je décide de prendre les oreillettes que Marine me tend et d’écouter ma musique préférée afin de me (re)donner un peu de courage ! En plus de mes supporters qui vont pouvoir me sur cette troisième et dernière montée.
Le mot de Marine : Enfin avant de suivre la bête, nous on a les crocs avec N’Lou car il est midi passé. Ça tombe bien, il y a un camion pizza qui nous fait de l’œil depuis notre arrivée, alors on va se rassasier et rattraper Damien au plus vite.
C’était sans compter sur de jolis champs de lavande sur notre route, qui étaient un appel à sortir le drone pendant un petit quart d’heure. Bon, on n’a pas non plus abusé, parce qu’on a un Damien qui va bien avoir besoin d’encouragements. Même si la montée est annoncée plus facile de ce côté, il a déjà un peu plus de 5 heures de vélo dans les pattes et la fatigue qui se pointe petit à petit.
Récemment j’avais échangé avec deux instagrameuses : Héloïse et Pauline qui se lanceront début 2021 dans un tour du monde à vélo (@2_nanas_a_velo). Elles ont décidé fin juillet de s’essayer au Mont Ventoux par Sault justement en entraînement ! Je trouvais l’idée géniale mais je ne m’en sentais pas capable. De plus avec Loulou à surveiller, je n’aurais pas eu mon coach à mes côtés pour m’encourager. Même si ça me trottait quand même un peu en tête.
Finalement, le grimper en voiture me renforce l’idée que c’est quand même costaud, même si germe dans ma tête l’idée que Damien puisse me suivre en voiture avec Loulou et que je pourrais n’en faire que les 20 premiers kilomètres… Mouais, sors-toi cette idée de la tête Marine et concentre-toi sur la route.
Les 20 premiers kilomètres se passent bien et je ressens bien le fait que les pentes sont plus douces ! Je suis accompagné par un vieux briscard des routes pendant un long moment. Ce jeune retraité avec qui j’échange m’annonce qu’il a fait la traversée des Alpes l’année dernière en vélo : 600 kilomètres en 4 jours. Pas mal non ?
Le moment tant attendu (et redouté) arrive : j’arrive une nouvelle fois au Chalet Reynard (comme pour la montée par Bédoin) avec ses 6 derniers kilomètres raides jusqu’au sommet qui m’attendent derrière ! Marine n’est pas encore là, mais surement toute proche. En effet, alors que je m’élance dans la première montée de ce final de col, j’entends les klaxons au loin ! Et c’est au moment où j’arrive à hauteur d’un coureur à pied allemand, qu’elle nous encourage tous les deux !
Pour la faire court, j’ai souffert comme jamais : un soleil de plomb, beaucoup de cyclistes qui me doublent, ma musique qui ne fonctionne plus par manque de réseau et l’absence de sourires à ma team support. Mon visage est trop crispé pour réussir cette prouesse. Un cauchemar… Heureusement, le dernier lacet approche avec l’antenne qui culmine au sommet visible depuis 6 bornes. Je laisse mes dernières forces et l’adrénaline prendre le dessus pour atteindre ce troisième sommet !
Fini pour le sommet par Sault : 25,7 km (1152 de D+ et 4,48% de moyenne, 10,5% max) ! Je peine à descendre du vélo que je laisse à Marine, pour enfin me poser les fesses par terre et reprendre mes esprits ! 5 longues minutes à ne pourvoir rien faire d’autre que d’attendre et de reprendre mon souffle ! Il y a longtemps que je n’avais pas tant souffert. Et j’oublie à chaque fois l’effet que cela fait !
Marine me propose un dernier coca, que je sirote en discutant avec quelques cyclistes… Parmi eux, un belge qui a aussi fait les 3 côtés aujourd’hui et un papy de 75 ans orginaire de Gap qui vient régulièrement grimper le Ventoux.
Le mot de Marine : Ce papy… Il m’a impressionnée… Je l’ai croisé à la borne « 4 km avant le sommet » où il prenait une photo de la stèle de Tom Simpsons, un ancien coureur cycliste britanique décédé le 13 juillet 1967 lors de l’ascension du Mont Ventoux.
J’ai alors discuté avec lui rapidement et l’ai félicité pour l’ascension qu’il réalisait. Il m’a dit qu’il n’était pas encore au sommet, que le bravo attendrait là-haut. J’ai donc attendu qu’il arrive pour le congratuler en bonne et due forme ! Il était ravi et a discuté avec nous un instant ! Un sacré petit bout de grand-père très touchant !
D’ailleurs, je ne sais pas ce que c’était que toute cette émotion toute la journée, mais j’étais tantôt impressionnée, tantôt émue, tantôt joviale, de voir tous ces gens, leurs expressions, leurs sourires, leurs réponses à mes encouragements. Et j’ai aussi croisé une famille avec leurs deux petits garçons… Ils grimpaient tous les 4 au sommet en poussant les enfants d’une main dans le dos pour les aider dans les portions les plus délicates… Que c’est génial !
On finit par réaliser quelques photos souvenir face au fameux panneau du sommet et il sera temps pour moi de redescendre au point de départ pour achever ce défi. Je redescends donc par Bédoin et bloque mon compteur après une descente très tranquille en 07h13 pour 135 kilomètres ! Je suis ravi de ce résultat et bientôt félicité par un groupe de belges qui m’avaient repéré ce matin dans les cols.
Marine me récupère dans le village, pour ranger le vélo et me ramener vers le camping. Je n’ai pas voulu affronter la dernière côte nous menant vers notre emplacement ! Je suis exténué… je ne veux plus rien faire à part lézarder au soleil à boire mon eau pétillante favorite !
On fera tout de même une balade dans le village afin de s’offrir un verre en terrasse en guise de récompense et quelques courses pour le lendemain… Notre repas à base de saucisse-riz-pesto rouge fera le bonheur de mes papilles avant un gros dodo !
3 montées et 3 descentes dans l’année de 33 ans… Et je suis proclamé « cinglé du Ventoux » ! Vivement mes 66 ans pour la bicynglette (elle existe vraiment) !
Allez, on se couche car demain, c’est Marine qui s’est lancé son propre défi, et ce sera à moi d’être le parfait petit supporter. N’Lou aura tout à m’apprendre.
Zzzz…
8 Comments
Quand je lis tout ça, Damien est super courageux, il faut le faire ,mais ne force quand même pas trop, ne dépasses pas tes limites tu vas nous faire une crise cardiaque, je vous fais de gros bisous et je pense bien à vous.♥️
On en avait parlé et il l’a fait. T’es Cinglé Damien, c’est confirmé ! 👏🧔🏻🚴⛰️
Encore un bel exploit pour Damien, félicitations en plus par ce temps …Nous attendons maintenant l’exploit de Mounette 😜❤️❤️❤️❤️Bisous.
Félicitations !!!!!!
Merci pour tous vos petits mots 🙂 !!
BRAVO l’Artiste, une volonté de fer, vouloir, pouvoir réaliser,un totem dans une vie, qui permet de presque tout réussir, super,et sacrée équipe, que vous trois !!!!!
Toutes mes félicitations pour cet exploit et ce récit, j’aimerais également me frotter à ce défi, es-ce que je pourrais connaître le braquet de ton GIANT et encore BRAVO
Un grand merci ! J’ai des plateaux de 50-34 et au niveau pignon je roule avec du 11-30 pour ce type d’effort ! C’est un beau défi à relever en effet et on est content d’atteindre le sommet et d’y savourer un bon soda 😜